Le titre est correct et faux en même temps. Asti Even avait un succès énorme avec son concert de l’Avent au Val-Sant-Père dans l’église Saint Pierre. Les tickets pour les 240 places de l’église étaient vite vendus. Un magnifique décor accueillait les spectateurs pour un concert de deux heures avec des chants de Noël et des chants populaires.
Le Chœur de la Baie n’avait pas la même chance cette année avec le curé de l’église de Pontorson. Le curé Romain Farque a refusé que son concert aie lieu dans l’église. Le Chœur de la Baie a présenté sa pastorale dans le prêche, petite salle adaptée à un tel spectacle intime, si elle était mieux entretenue. Il sera nécessaire de moderniser cette salle sans chauffage. Il faisait froid dans la salle, très froid.
Mais d’où vient ce conflit qui a dérobé le Chœur de la Baie de sa scène habituelle? Il faut d’abord voir que la loi de 1905 détermine la laïcité de la France. Par cette loi on avait aussi confisqué les églises. (Cela pose aujourd’hui d’énormes problèmes financiers aux communes.) Seulement : chaque fois qu’un nouveau curé est intronisé on lui offre les clés du bâtiment. Ce sera donc lui qui sera responsable de ce qui s’y passe comme cérémonies. La commune gère le bâtiment, le curé gère les âmes.
Lorsque le Chœur de la Baie lui a présenté sa pastorale, il a refusé de prêter l’église à cette pièce. Quand il s’agit de sujets religieux il est intraitable. Et la pièce du Chœur de la Baie était un scénario vulgarisé de la naissance du Christ. Le curé – de sa conviction profonde – ne pouvait pas l’accepter. La solution était la représentation au prêche. On peut prédire que cette salle sera le nouveau lieu de représentations pour le Chœur de la Baie.
Depuis 15 mois Romain Farque est le curé de la paroisse de Pontorson. Le nouveau curé appartient à l’ordre Saint-Martin. La communauté a été fondée dans les années 1960 après le concile Vatican II qui réformait le cérémoniel dans l’église. Ses fondements sont une opposition à cette libéralisation. Elle est considérée comme conservatrice.
Romain Farque était prudent avec des changements dans le cérémoniel de la messe. D’abord les croyants ont reçu de petites feuilles avec l’explication de quelques petits changements. Après 15 mois on a pris l’habitude de l’encensement de l’autel, du prêtre et des fidèles. La confession et une messe ont lieu le mercredi matin pendant le marché. Il y a même une messe en latin qui refait surface le samedi matin, et ceci contre une forte réticence du pape. Le curé: « Mais ce n’est pas d’après la cérémonie tridantine (cérémonie décidée au concile de Trient au 16ème siècle et fixé par le Pape PIE V) », se défend le curé. Dans cette cérémonie installée par le pape Pie V la messe est dite avec le dos au croyant qui sont plutôt des spectateurs. A l’époque le latin a été décidé comme langue universelle de l’église. Les règles de ce concile ont été valables pendant 400 ans.
On remarque pendant la messe du dimanche à Pontorson une forte affluence de jeunes familles bretonnes avec des enfants qui assistent à l’office. Et on remarque une renaissance de piété pendant la messe. Beaucoup de croyants s’agenouillent sur terre. Le curé s’incline assez souvent derrière l’autel. On remarque qu’on parle beaucoup plus de pêché et de repenti pendant la messe. Romain Farque dirige la messe avec les prières vers le Pardon aux pêchés tout en expliquant qu’on devient « saint« si on pratique les principes de la religion tous les jours.
Une des conséquences de la loi de 1905 est aussi que l’église ne commente plus les faits sociétales ni politiques. Chaque prêtre reçoit l’ordre de l’évêque lors de sa nomination « d’expliquer l’évangile ». De cette façon le sermon du curé devient un discours sur l’application de la morale chrétienne. Le curé Romain Farque a un don pour le sermon. Il sait raconter, argumenter et expliquer même s’il parle parfois trop vite, même si les fins de ses sermons sont abruptes. Agé d’une quarantaine d’année il a l’air d’un jeune homme vif.
Par son rejet du Chœur de la Baie Romain Farque fait comprendre que l’église est une maison de Dieu. Romain Farque se trouve sur le même niveau d’argumentation que l’archevêque de Paris qui a répondu « la cathédrale Notre Dame est une église », lorsque la ministre de la culture a voulu installer des droits d’entrée pour visiter le bâtiment. Le refus pour le Chœur de la Baie a une simple raison : le curé n’accepte pas dans son église un spectacle laïque expliquant la religion.
Ceci n’exclut pas des manifestations culturelles. Mais là aussi il a des convictions claires : » Je n’ai rien contre un concert classique à l’église ». Reste la question du spectre « classique ». Va-t-on un jour entendre « amazing grace » ou le « Halleluja » de Leonard Cohen à l’église de Pontorson ? A Paris elles faisaient partie du concert de la réouverture de la cathédrale. Et pour l’occasion Leonard Cohen avait écrit un texte en français.
Deux observations :
L’église et les fidèles à Pontorson assistant aux messes à Noël étaient protégés par des soldats armés. Une action dans le cadre de la mesure de sécurité Vigipirate. En France on a compté autour de 1.000 attaques d’églises catholiques au cours de l’année. Le désamour de l’église catholique exprimé à la Révolution Française qui continue avec la loi de 1905 continue en 2024 et nécessite la protection de l’armée pour pouvoir célébrer la messe en sécurité.
Tous les 25 ans l’église catholique fête une « année sainte ». Le Pape a inauguré l’année sainte 2025 pendant la messe de Noël dans la Basilique Saint-Pierre à Rome. Dans toutes les paroisses du monde on cherche la symbolique pour le début de cette année sainte 2025. Ce dimanche 28 décembre la grande porte de l’église Notre Dame de Pontorson fut ouverte largement à la fin de la messe et le curé en sortit précédé des enfants de chœur portant la croix et des cierges.