La Manche perd son évêque

Laurent Le Boulc’h, Archevêque de Lille depuis le 1er avril 2023, ©évêché de Coutances et d’Avranches

Laurent le Boulc’h, évêque de Coutances et d’Avranches quitte la Manche. Il a été nommé Archevêque de Lille depuis le 1er avril 2023. Il sera consacré le 20 mai 2023. Le nom de son successeur n’est pas encore connu.

Laurent le Boulc’h, né à Loudéac en Bretagne, est prêtre catholique depuis 1988. L’ordination comme évêque de Coutances et d’ Avranches avait eu lieu en 2013.

Le Boulc’h quitte son poste à Coutances au moment d’une restructuration organisatrice de l’église manchoise qui crée des inquiétudes spécialement dans la Baie du Mont Saint-Michel. La région entre Avranches et la frontière bretonne est rurale, caractérisée par des petits villages, abandonnés par l’église catholique depuis longtemps. La ville nouvelle du grand Pontorson dispose de neuf bâtiments d’églises qu’elle entretient mais où la plupart du temps il y a tout juste une messe par an. Le maire de Pontorson, André-Jean Belloir, refuse néanmoins strictement de désacraliser une ou plusieurs de ces églises.

La France, qui a porté jadis le titre de « fille de l’église », l’a perdu depuis longtemps. Le pays souffre terriblement d’un manque de prêtres. La stricte séparation l’église et l’Etat depuis la loi de 1905 fait disparaitre la religion catholique de la vie publique et de plus en plus de la vie tout court. « La France dispose encore seulement de 5  000 prêtres catholiques » argumente le philosophe Luc Ferry dans les discussions sur son dernier livre « Philosophie et christianisme pour les nuls ».

Devant ce manque d’abbés, Laurent le Boulc’h s’est alors ouvert vers la communauté Saint Martin qui attire de jeunes hommes pour la vocation de prêtre de l’église catholique. Il a appelé Don Maurice Franck comme recteur du Mont Saint-Michel. L’évêque lui avait donné la mission de réfléchir si on pouvait installer la communauté Saint Martin dans la Baie et surtout dans le prieuré d’Ardevon. Le prieuré devient le centre spirituel du Mont Saint-Michel, vu que l’Etat possède le monument.

Il n’y avait aucun doute que cette communauté, fondée en 1965 en opposition aux décisions du deuxième concile du Vatican de Jean XXIII et soutenue par le cardinal de Gênes de l’époque, allait se retrouver dans la Baie. Seulement : l’arrivée attendue de trois confrères dans la paroisse de Pontorson faisait déjà des vagues avant leur arrivée ce dont l’évêque se serait bien passé.

Le départ prématuré de trois religieuses au mois de mars de leur appartement qui n’aurait dû quitter la commune de Pontorson qu’en septembre était accompagné par des paroles inhabituellement dures. L’oratrice de l’hommage parlait « d’une décision brutale ». Et dans l’ensemble des fidèles on dénonçait une incompréhension pour le peu d’estime de la part de l’église pour le mérite de ces trois sœurs. On sentait une froideur arriver dans la paroisse de Pontorson. Une froideur qui continuait dans le presbytère ou – d’après les informations d’inforama –  une personne aurait démissionné vu « l’autoritarisme » de l’évêque.

Laurent le Boulc’h va quitter la ruralité de la Manche pour une métropole internationale. Le pape François n’a sûrement pas pensé à la guerre de Flandre de 1667 lorsqu’Antoine d’Aumont de Rochebaron longeait les côtes de la Manche pour faire la guerre des Flandres lorsqu’il nomma le manchois/breton Archevêque de Lille. Mais Laurent le Boulc’h va entrer dans un autre monde, avec des industries, une histoire et mentalité industrielle, une bourgeoisie aisée, avec des transfrontaliers vivant en France, travaillant en Belgique, et avec l’Europe devant la porte. Il va vivre dans un pays qui même 356 ans après une des plus grandes victoires guerrières de Louis XIV respire toujours l’esprit flamand et ou à une heure de route se trouve l’endroit de la plus grande défaite d’un empereur français, Waterloo. Il va vivre enfin une autre idée du catholicisme que celle dans la Manche.

L’évêque de Coutances et d’Avranches laisse derrière lui la province française pour s‘immerger dans l’histoire française, une des grandes régions industrielles, commerciales, politiques et culturelles françaises et européennes. Il laisse derrière lui une restructuration de l’organisation de son évêché inachevée et le suspense dans le sud de la Manche pour les mois à venir.

Portrait de d’Artagnan en frontispice de la deuxième édition des Mémoires de Monsieur d’Artagnan de Gatien de Courtilz de Sandras ©Wikipedia

Remarque : Une des plus grandes figures du roman historique de France, Charles de Batz de Castelmore, dit d’Artagnan, est gouverneur de Lille d’avril à décembre 1672. Il est mort en juin1673 lors du siège de Maastricht, atteint par une balle à la tête.

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